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Au Banquet: À visage découvert

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Le débat sur la tolérance des symboles religieux dans la sphère institutionnelle est relancé intempestivement. N.S., victime d’une série d’agressions sexuelles, a refusé de retirer son niqab lors de son témoignage contre son oncle et son cousin. Sa cause fut d’abord portée à la Cour d’appel ontarienne qui a établi des critères d’exception à la règle générale de témoigner à visage découvert. Ce n’est que par sa requête à la Cour suprême du Canada que la plaignante reçut pleine satisfaction. Le fardeau de satisfaire à certaines conditions ne s’appliquerait plus à la porteuse du voile, mais au juge lui-même pour exiger le dévoilement… La juge en chef Beverly McLachlin a rendu sa décision sur la mince majorité de quatre sur six. Les deux juges originaires du Québec ont exprimé des opinions divergentes: Marie Deschamps votant avec la majorité tandis que Louis Lebel inscrivait sa dissidence.

D’après un expert des droits de la personne, Me Julius Grey, la raison d’être de la Charte canadienne est de veiller à ce que la majorité ne régisse pas les droits de la minorité. Un énoncé de principe tellement mal adapté à la complexité sociétale du Canada qu’il a fallu y inclure une clause dérogatoire, laquelle constitue un compromis important en faveur d’une certaine souveraineté des parlements provinciaux.

Au Québec, il existe un consensus au sein des partis politiques à l’effet de prohiber le port de symboles religieux par les représentants de l’État dans l’exercice de leurs fonctions. Or, une éventuelle Charte québécoise de la laïcité officialisant cette règle serait désormais jugée inconstitutionnelle par la plus haute Cour canadienne. À moins, bien sûr, d’évoquer la fameuse clause dérogatoire à laquelle Pierre Elliott Trudeau aura été contraint bien à contrecœur…

L’avocate Julie Latour, qui fut bâtonnière du Barreau de Montréal en 2006-2007, déplore le vide juridique qui a permis cette dérive. Elle estime que la «démission du législatif» a conduit à «l’hyperactivité du judiciaire». Ainsi, l’invention du «principe d’accommodement» serait une intrusion du pouvoir judiciaire dans la sphère politique responsable devant le peuple de légiférer. Seuls les élus s’avèrent investis du pouvoir de légiférer par la population qu’ils représentent; ainsi fonctionne notre démocratie.

Étant donné le contexte actuel impliquant le droit canadien, le droit en usage au Québec, de même que la diversité culturelle sur le vaste territoire, l’adoption d’une Charte de la laïcité s’avère impérieuse. Telle est la posture de Daniel Turp, professeur titulaire à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. Le spécialiste, reconnu pour ses compétences en droit constitutionnel et international, se distancie de la proposition de Gérard Bouchard, ce dernier prônant une «laïcité inclusive». Le professeur Turp appelle plutôt ses concitoyens à une «totale neutralité» étatique et institutionnelle. La radicalité s’impose et peut seule mettre fin à l’imbroglio juridique dans lequel nous risquons de nous empêtrer.

Aucun commentaire ne fut entendu à la table d’honneur concernant le jugement controversé.

La position du gouvernement péquiste est cependant bien connue pour avoir été clairement établie durant la dernière campagne électorale. «S’affirmer» disait Pauline Marois, «les valeurs québécoises ne sont pas négociables». Jean-François Lisée proposait d’utiliser la clause nonobstant de manière préventive. Là où nous en sommes maintenant, il y aurait urgence d’agir de manière…corrective: pour reprendre ce pouvoir qui nous est ôté!

Liette Perreault


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